Le parti socialiste est à nouveau au travail. Les différentes conventions qui vont ponctuer l’année 2010 vont nous permettre de nous réarmer au niveau intellectuel. Il était temps !
Alors surtout n’évacuons aucun sujet. N’acceptons pas, par exemple, d’occulter le sujet de la régulation du temps de travail. C’est une évidence, depuis la réforme des 35 H , la gauche est mal à l’aise avec cette question. La propagande libérale du MEDEF (« les 35 H sont une aberration ») et de l’UMP (« travailler plus pour gagner plus ») a imprégné les consciences à un point tel que même les socialistes n’osent plus dire que le travail est une valeur de gauche et que la réduction du temps de travail est une idée juste, qui va dans le sens du progrès humain et qui mérite qu’on se batte pour elle.
Observons ce paradoxe: entre 1900 et 1970, la durée du travail a été divisée par deux, alors que la productivité était quasi stable; ces quarante dernières années, alors que la productivité a explosé, la durée du travail est restée quasi inchangée !
Les progrès techniques ont fait que nous produisons beaucoup plus en beaucoup moins de temps. L’offre de travail, pour un volume de production donné, a donc diminué, quand la demande de travail, elle, a augmenté, avec notamment l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail.
Et les Français – c’était l’interrogation d’un livre de Guillaume Duval (Alternatives économiques)- sont loin d’être des paresseux. Notre taux de productivité est l’un des meilleurs au monde, ce qui est un atout considérable dans la compétition économique internationale. Et nous travaillons plus longtemps, en moyenne, que de nombreux pays « développés » : 36,3 heures (tous emplois confondus), contre 35,2 heures en Suède, 35,8 heures en Allemagne, 31,4 heures aux Pays Bas… (source INSEE et Eurostat).
Cette réalité doit nous inciter à repenser la question du travail , surtout quand on comprend que la croissance , même durable, sera insuffisante pour vaincre le chômage de masse. Parce qu’elle induit, dans le même temps, de nouveaux gains de productivité, la croissance ne peut, à elle seule, être la solution. Alors quand on admet en plus, suivant en cela la majorité des économistes, que la sortie de crise que nous promet la droite n’aboutira (et on le voit en ce moment) qu’à une croissance molle, sans effet sur l’évolution du taux d’emploi, il devient évident que d’autres solutions sont à trouver pour vaincre le chômage…étape incontournable du financement des retraites……….
La droite prétend que le partage du temps de travail ne se fait nulle part ailleurs qu’en France. C’est une contrevérité trop facilement admise ! Dans le monde néolibéral, ce partage nous est de facto imposé : quand certains travaillent 40 heures ou plus, dans un pays aux 27 millions d’actifs potentiels, beaucoup d’autres doivent se contenter de 15 ou 20 heures, ou…de rien du tout (4 millions de chômeurs).
Nous avons le choix: un partage du travail néolibéral, dicté par la concurrence et la compétition entre les hommes, ou un partage maîtrisé, articulé avec un projet de société. Réduire le temps de travail individuel n’est pas dévaloriser le travail, c’est faire en sorte qu’il profite à tous !
Bien sûr, il faudra tirer les leçons de l’expérience des lois votées en 1998 et 2002. La réduction devra être minutieusement préparée et graduellement mise en oeuvre avec les organisations syndicales, les représentants des PME et des grandes entreprises.
Le financement de cette réduction du temps de travail a déjà été étudié et validé par de nombreux experts. Il passe par une exonération de cotisations sociales ou par la modulation de l’impôt sur les sociétés….qui devront elles-mêmes être conditionnées à l’embauche. Autant soutenir les entreprises qui embauchent plutôt que d’indemniser des chômeurs.
Réduire le temps de travail n’est pas une idée nouvelle. La gauche l’a porté à plusieurs moments glorieux de son histoire. Raison de plus, en cette période de reconstruction, de ne plus accepter la propagande libérale et de briser le tabou qui nous a été imposé.
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